Fabulae Mundi Séance 3 : Archéologie des récits stratégiques en Relations internationales : une autre histoire du réalisme

Lundi 24 novembre 2025

Séance 3 : Archéologie des récits stratégiques en Relations internationales : une autre histoire du réalisme

Le 24 novembre de 10h à 12h, Salle Saint-Exupéry (IRSEM) Bâtiment 13

Avec Elie Baranets (IRSEM)

 

Cette séance propose une relecture du réalisme en relations internationales à partir des récits stratégiques. Il avance que loin d’ignorer les récits, le réalisme s’est constitué en dialogue étroit avec eux. La première partie revient sur The Twenty Years’ Crisis d’E.H. Carr, souvent présenté comme une œuvre à la fois « anti-utopiste » et acte de naissance du réalisme en Relations internationales. Relu à la lumière des travaux contemporains sur les récits stratégiques, Carr apparaît au contraire comme un théoricien implicite de ces récits : il met au jour leur fonction de légitimation, leur enracinement institutionnel, leur dimension performative et les conditions sociales de leur réception, tout en soulignant leur fragilité lorsque le discours ne correspond plus aux expériences et attentes collectives. Cette lecture conduit à une révision de l’histoire canonique du réalisme.  

 

La seconde partie propose une généalogie de la pensée réaliste, de Niebuhr et Morgenthau à Waltz, Gilpin et Mearsheimer. Elle montre que, sous des formes variables, ces auteurs organisent leur pensée autour de structures que l’on peut qualifier de proto-narrations tragiques : répétition des dilemmes, irréversibilité des choix, désajustement croissant entre ordre et puissance, engrenages stratégiques sans issue. Même lorsque le récit explicite est récusé (chez Waltz notamment), la théorie produit un effet tragique qui confère au réalisme une forme de narrativité implicite et pose les bases d’une approche narrative plus explicite. Chez Gilpin puis Mearsheimer, en effet, la mise en intrigue devient un ressort pleinement assumé de la démonstration. Réalisme et récit ne s’opposent pas terme à terme. Réalisme et récit ne sont ni étrangers ni simplement opposés ; leur tension constitue l’un des moteurs des compétitions narratives qui structurent les relations internationales comme champ savant et comme pratique de pouvoir.

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