Qui êtes-vous ? Racontez-nous votre parcours ?
J’ai commencé mon postdoctorat résident à l’IRSEM en octobre 2019. J’ai soutenu ma thèse à l’Université du Minnesota aux États-Unis, en collaboration avec le laboratoire CESSMA de Paris 7 Diderot. Ma thèse portait sur les gardes de sécurité privée à Delhi, et sur la façon dont ils quadrillent l’espace urbain en en excluant les plus pauvres.
Avant ma thèse, j’ai étudié l’histoire et les lettres modernes à Rennes 2, et la philosophie à Paris Nanterre, avant de m’orienter vers la géographie et l’urbanisme. J’ai vécu en Inde en tant qu’étudiant en échange à l’Université de Delhi et à l’École d’urbanisme et d’architecture de Delhi. J’ai travaillé un an comme visiting scholar à Columbia University à New York et complété un MSc en études urbaines à l’University College London. J’ai également travaillé avec une entreprise bordelaise d’urbanisme en tant que micro-entrepreneur. Je m’intéresse en général à la façon dont sont présentés les rapports entre société et environnement, et aux transformations qu’il nous faut faire.
Quels sont vos axes de recherche actuellement ? Où peut-on vous lire ?
Je travaille à l’IRSEM sur les forces armées de police en Inde. Il s’agit d’un ensemble de forces totalisant près de 900 000 hommes dans plusieurs corps assez spécialisés. Elles sont chargées en particulier de la défense des frontières, de la contre-insurrection et du maintien de l’ordre, partout où l’État central le juge nécessaire. J’examine d’abord la manière dont ces forces sont déployées pour combattre la résistance des populations locales afin de permettre l’exploitation de ressources minières polluantes. Puis j’étudie leurs capacités d’intervention sur les catastrophes environnementales notamment telles que les cyclones. Et enfin, j’observe comment ces forces disciplinées et relativement proches du pouvoir montent en puissance dans un contexte de mise en place d’une politique nationale de plus en plus déséquilibrée en faveur des hindous. Parallèlement, je m’intéresse à la façon dont la défense, notamment en Inde, relève le défi du réchauffement climatique, parfois en accusant les plus pauvres d’être responsables des dégradations environnementales dont ils sont les premières victimes.
En dehors de ma thèse, qui est accessible, mes recherches sont en cours de publication. Un article grand public sur l’environnement en Inde paraîtra prochainement dans les Carnets du Temps, dès que les presses recommenceront à tourner. J’ai récemment rédigé pour l’IRSEM une note de recherche qui devrait sortir bientôt. Enfin trois articles sont en cours de révision pour des revues scientifiques à comité de lecture, L’Information géographique et Economic and Political Weekly.
Pourquoi avoir choisi la « recherche » ? Comment percevez-vous votre rôle de chercheur ?
Je ne sais plus très bien, j’étais jeune et plein d’illusions ! J’étais surtout passionné par les questions qui s’enchaînaient et m’entraînaient à creuser plus loin. J’ai choisi la géographie parce qu’elle me donnait des clefs pour comprendre le monde dans lequel nous vivons. Je pense cependant que j’aurais fait de la recherche même en m’orientant vers une autre discipline. La géographie me permet de faire des recherches interdisciplinaires et de m’intéresser aussi à la sociologie, l’urbanisme, etc. Je ne conçois pas mon métier de géographe sans la possibilité de travailler de temps en temps sur le terrain, de mener des entretiens et des enquêtes auprès de mes sujets d’étude en Inde. Il est aussi important pour moi de pouvoir enseigner, même occasionnellement. Mes étudiants me rappellent le sens du travail que je fais.
Être chercheur à l’IRSEM permet de toucher des publics différents, plus proches de l’action comme de la prise de décision ainsi que de bénéficier d’un accès unique à différentes perspectives sur le monde et le rôle que notre pays y joue.